L’objectif de cette équipe de recherche inclus dans un groupe plus large nommé « global oncofertility network » est de trouver de nouvelles technologies pour préserver la fertilité avant une chimiothérapie ou radiothérapie chez les enfants prépubères. Ce n’est pas un fait rare car chaque jour, 43 enfants sont diagnostiqués pour cancer, et plus de 85 % survivent à 5 ans (1). D’où l’intérêt de faire des études sur la préservation de la fertilité ultérieure. En effet, si une irradiation dans la région ovarienne entre 5 et 20 Gy représente un risque d’insuffisance ovarienne prématurée (2). Ainsi, une fille irradiée à l’âge de 12 ans risque d’avoir une insuffisance ovarienne prématurée à l’âge de 19 ans et demi.

Quelle option lui proposer ?

Pour les filles, les propositions actuelles sont l’auto transplantation, une section d’ovaire est prélevée avant le traitement par radio ou chimiothérapie, puis congelée et ultérieurement transplantée sous la capsule ovarienne (3). Le risque majeur est de transférer des cellules cancéreuses (4).

La recherche s’est alors axée vers une méthode plus sûre. L’équipe s’est donc rapprochée d’une équipe d’ingénieurs pour travailler sur une matrice synthétique pouvant recevoir les cellules de la thèque, de la granulosa et des follicules, tout en permettant des interactions multiples intercellulaires. Mais aussi avec une plasticité permettant l’ovulation, tout en étant suffisamment rigide pour permettre une transplantation.

L’équipe a pris dans un premier temps un modèle murin. La première étape de ce travail a consisté à décellulariser (ou désolidariser) les ovaires pour avoir uniquement la trame ovarienne et étudier sa structure en microscopie électronique (5). L’étude minutieuse microscopique a conduit à 3 modèles de trames différents, avec une orientation des travées à 30, 60 ou 90 degrés. Ainsi ont été modélisé, pour l’imprimante 3D, trois trames ovariennes différentes. Le matériel choisi pour la trame est la gélatine.

Capture d’écran 2016-06-01 à 18.46.01En parallèle, l’équipe a développé la culture primaire de cellule ovarienne et a ensuite intégré ces cellules dans la trame d’ovaire. Des souris, préalablement ovariectomisées, ont été greffées avec ces ovaires « synthétiques ». Dans les jours suivants, une augmentation du taux d’œstradiol a été notée chez ces souris, et à 3 semaines, une sécrétion d’AMH et d’inhibine A (Figure 1 a-c). L’étude microscopique a mis en évidence le développement de follicules matures (Figure 1 d-f). La structure, à 30 ou 60 degrés, a permis le meilleur taux de survie des follicules (5, 6). Ces greffes d’ovaires ont été un succès chez la souris puisque des portées de souriceaux ont été obtenues.

La prochaine étape de cette ambitieuse équipe sera de construire des bioprothèses ovariennes pour des animaux plus gros, d’investiguer les mécanismes de transduction au sein de la trame ovarienne synthétisée et d’obtenir des cultures de follicules à partir de cellules souches. Cette approche innovante représente l’espoir pour nos jeunes patientes afin de rétablir la fonction ovarienne et de restaurer la fertilité.

Capture d’écran 2016-06-01 à 18.47.11

 

Figure 1 : Décellularisation de tissus humains et bovins (5)

 

 

 

 

Références :
(1) Mariotto AB, Rowland JH, Yabroff KR, et al. Long-Term Survivors of Childhood Cancers in the United States. Cancer Epidemiol Biomarkers Prev. 2009; 18:1033-40.
(2) Donnez J, Dolmans MM, Pellicer A, et al. Restoration of ovarian activity and pregnancy after transplantation of cryopreserved ovarian tissue: a review of 60 cases of reimplantation. Fertil Steril. 2013;99:1503-13.
(3) Meirow D., Levron J, Eldar-Geva T, et al. Pregnancy after transplantation of cryopreserved ovarian tissue in a patient with ovarian failure after chemotherapy. N Engl J Med. 2005;353:318-21.
(4) Dolmans MM, Luyckx V, Donnez J et al. Risk of transferring malignant cells with transplanted frozen-thawed ovarian tissue. Fertil Steril 2013;99:1514-22.
(5) Laronda MM, Jakus AE, Whelan KA, et al. Initiation of puberty in mice following decellularized ovary transplant. Biomaterials. 2015 ; 50: 20-9.
(6) Laronda MM et Rutz (under review 2016)
D’après la communication Engineering a functional ovarian transplant de Monica Laronda (USA), ECE Munich, dimanche 29 mai 2016.